A propos d'une œuvre d'art, d'un ailleurs, du passage d'une porte au chemin couvert de feuilles. A propos de choses qui traînent, s'éparpillent sur le sol, sous nos pas, notre empreinte. C'est sur un chemin de croix qui monte vers une fontaine, et le silence alors … comme la pierre fendue, défendue parce qu'elle est d'ici, de ce pays. La fontaine y coule des jours paisibles dans ce lieu caché, mystérieux. Les bruits de la forêt sont rares, le temps semble s'être arrêté. Il me vient une chanson, un souvenir oublié, un retour à la source. Il me revient le soleil, la lumière d'un jour où l'eau ruisselait à travers la forêt, un pont qui tanguait et le reflet de mon visage dans l'eau qui courait.
A propos de cette œuvre d'art. Ce ruisseau qui coule encore derrière moi comme une ombre qui me suit, qui me reflète aux premiers rayons de l'aube. La musique perd ses quelques notes dans cette forêt au vague à l'âme. Les feuilles se noient, les partitions s'envolent et la voix demeure muette. Il y a ce bruit du rien du tout, de l'immensité et c'est tout. Comme une nuit sans cauchemars, avec les mêmes chemins. Le rêve se dissimule sous les arabesques que dessine le vent dans les arbres. La beauté du lieu est saisissante, presque froide.
L’œuvre d'art se réveille, s'immobilise quelques instants puis reprend son souffle. Des paroles incompréhensibles s'échappent du lieu, des sons inaudibles se fondent dans la nuit avec parcimonie. Des petites choses fragiles se détachent des arbres et disparaissent aussitôt. N'importe où, l’œuvre d'art est là, au milieu de nulle part, dans l'insoupçonnable.
Marcher au bord du ruisseau pour ne pas se perdre, le fil qui me conduit au dehors, à la vie des autres. Mais je voudrais moi aussi me fondre dans le décor, arpenter les chemins à la recherche d'une ombre qui veuille bien de moi, me porter au vent, me farder de l'obscurité et miroiter dans l'eau de la fontaine.
Mon œuvre d'art, l'eau qui coule dans mes veines, mes racines ici et là, pour la beauté du lieu.
Je ne sais plus si le soleil éclaboussait le paysage de ses rayons intrinsèques, je ne sais plus pourquoi j'étais là, mais il y avait devant moi cette œuvre d'art, cet arbre qui semblait soulever les nuages.