Les forêts médusées

Les lieux, histoires et souvenirs …

Partie 2

 

 

 

A cette même époque, mes parents, mon petit frère qui était encore tout bébé et moi-même, vivions en Vendée. Le jour où je su que j'allais avoir un petit frère, ma maman et moi étions parties en ville. En rentrant, ma mère se courba au dessus de moi et me dit doucement «  Tu vas avoir un petit frère Emmanuelle ! ».

A l'école, j'avais quelques amis mais j'étais assez solitaire. Je me souviens avoir eu une amie qui se prénommait Céline et qui s'est petit à petit éclipsé de ma mémoire; Claire aussi, la fille d'un docteur qui s'était cassé le bras dans sont toboggan, chez qui j'avais goûter mes premières pommes noisettes, avec qui j'étais partie en classe de mer. Étrangement, j'ai très peu de souvenirs de cette classe de mer. Je me souviens avoir récolté pleins de cadeaux grâce à une chasse au trésor, qu'on dormait sur des lits superposés et qu'on nous avait prit en photo sur ces mêmes lits en pyjama pour les présenter par la suite à nos parents, sans doute ravis de nous découvrir en pyjama sur des photos floues !

J'ai encore sur moi la cicatrice d'un poignet passé à travers une fenêtre. Je ne saurais jamais pourquoi j'ai fais çà, ni personne d'ailleurs. J'avais le bras ensanglanté et tout un pansement blanc devenu rouge vif autour du poignet. Mes parents se faisaient du souci pour moi. Ma sœur était partie je ne sais où et j'avais une amie qui m'emmenait souvent chez elle. Sa mère nous faisait des beignets aux pommes succulents et quand je revenais, je sentais la friture. J'ai aussi disparue quelques heures alors que mes parents me cherchaient. Je devais aller au cirque, une représentation avait lieu en ville mais quand je suis arrivé à la caisse, une dame m'a dit que je n'avais pas assez d'argent sur moi. Mes parents étaient partis en balade, j'étais donc seule. Je suis rentré dans la cour de la maison mais la porte était fermée. Il y avait bien la fenêtre de la chambre de mon frère qui était ouverte mais elle était en hauteur et mon frère ne m'entendait pas quand je criais. La faute à Tina Turner. Mes parents m'ont retrouvé chez la mère d'un ami. Je les avais rencontré près de la boulangerie, devant les toilettes publics et cette dame avait eu peur pour moi. Je me souviens encore de la colère de mes parents ce soir là.

Je n'aimais pas vraiment cette ville grise, je ne l'ai sans doute jamais aimé. J'en ai des souvenirs étranges, périlleux. Alors, quand mes parents l'ont quitté pour une autre ville à quelques kilomètres de là, j'étais contente.

 

Nous habitions sur la place de l'église. J'avais l'impression de participer à chaque cérémonie, chaque messe dès que les cloches raisonnaient. Cette nouvelle maison était grande et elle avait un escalier que j'aimais descendre en glissant sur la rampe. Dehors, le jardin était vaste et mon petit frère était assez grand pour que je puisse lui apprendre à faire du foot ! Il y avait des palmiers dans lesquels se cachaient des lézards. Deux cerisiers offraient de belles cerises en saison et des roses parfumaient le jardin. Une de mes plus grandes tristesses dans ce jardin, c'est quand mon père à choisi de faire couper le mimosa. Il était grand et beau, il sentait bon le soleil mais faisait de l'ombre à la maison. Les chats aimaient y grimper, faire leurs griffes... quand ils n'étaient pas dans le bureau de mon père, dans un carton à dormir toute la journée. Mon chat blanc avait un jour attrapé un petit oiseau dans ce jardin. J'ai voulu le garder pour le soigner. Malheureusement, l'oiseau n'a jamais pu revoler et ce fut un moment très pénible.

 

Ma nouvelle école était assez grande et aussi privée. J'ai eu ma première paire de lunettes au CP, des grosses lunettes roses et violettes avec un cordon rouge surmonté d'un coquillage pour ne pas les perdre dans la cour de l'école. Dans la classe, j'étais assise à côté de deux tortues miniatures dont il fallait s'occuper à tour de rôle. Je me souviens aussi d'une autre classe avec une autre maîtresse très poussée sur les choses du catholicisme. C'était la semaine du goût: je devais éplucher un coing pour le préparer à la dégustation de mes camarades et mon couteau à glissé. J'ai eu le malheur de laisser échapper un gros mot et j'ai été punie sur le champ.

La cour de l'école était assez grande pour jouer aux billes, une de mes grandes passions à l'époque. J'avais un très bon niveau et j'arrivais à récolter de jolies billes qui trônaient sur les étagères de ma chambre, devant mes barbies. Je jouais surtout avec des garçons: il y avait Bertrand, le fils du médecin qui est devenu marin, il y avait le rouquin qui était le maître des billes, le fan de Mylène Farmer qui chantait tout le temps et qui m'a sans doute donné le virus, Andy, le beau petit blond qui s'était cassé une dent à la piscine. Ma dernière classe dans cette école fut avec Monsieur T. J'aimais beaucoup mon professeur, il était très marrant et nous apprenait beaucoup de choses. Il nous passait souvent aussi des rediffusions de C'est pas sorcier, ou encore Va savoir, des émissions qui marchaient beaucoup à l'époque. J'ai appris comment le cœur battait, comment les animaux naissaient … Monsieur T aimait bien nous proposer des jeux, comme le ping pong ( je n'ai toujours pas récupéré ma raquette d'ailleurs ), de faire du dessin, des objets qui ne serviraient à rien mais que l'on offrait tout de même à nos parents. C'est dans cette classe que j'ai préparé ma plus belle boule de Noël: c'était une boule en polystyrène, piquée par des aiguilles à coudre dans lesquelles ont avait enfilé des perles de toutes les couleurs. C'était très beau mais j'ai eu la mauvaise idée un jour de vouloir récupérer toutes les perles. Comme cette école était privée, nous avions également droit à des cours de catéchisme que je redoutais fortement. Je m'y ennuyais souvent et toutes ces histoires de religion ne m'intéressaient pas. Et puis Monsieur T finissait souvent par une chanson parmi lesquelles celle sur sœur Emmanuelle que je connais toujours par cœur d'ailleurs.

J'ai du quitter cette classe avant la fin de l'année pour cause de déménagement. Mes parents souhaitaient se rapprocher de notre famille, dans le Nord.


Retrouver le Nord, c'était comme retrouver ma boussole. Je ne l'avais ni perdu, ni oublié, mais il me manquait. Ma famille me manquait. Nous nous sommes installés dans un logement avec de grandes pièces, de hauts plafonds, de grandes baies vitrées d'où je pouvais contempler le spectacle de la rue. De ma chambre, j'avais vue sur le café d'en face et il arrivait que des hommes un peu trop éméchés se tapent dessus, sur la route. Derrière ma vitre, dans la pénombre, j'assistais à ce qui se cache la nuit venue.

Le logement était vieux, les escaliers craquaient sous notre poids et le parquet menaçait de s'effondrer à tout moment. Parfois, quand je m'ennuyais, je jouais aux fléchettes dans le grenier attenant à la chambre de ma sœur. Mon grand frère me rejoignait et visait toujours très bien. Mon chat blanc nous regardait en s'endormant sur l'un des cartons qui pourrissait dans cette pièce sombre, aux vieux papiers peints chiffonnés. C'était l'époque du collège et j'avais l'impression que tout cela était trop grand pour moi. La ville, ses habitants, les magasins, le collège qui faisait également lycée. La cour était immense et je me souviens m'être souvent ennuyée à la pause. Parfois, j'allais chercher un petit pain au chocolat tout chaud à la maison des étudiants. Je me faisais bousculer par les grands. Je n'avais pas beaucoup d'amis et je n'en ai pas eu non plus parmi les professeurs. Ce fut sans doute les deux années les plus douloureuses de ma scolarité. Deux années aussi pendant lesquelles je me suis faite arracher quelques dents pour placer un appareil dentaire qui ressemblait plutôt à un casque de cosmonaute. Aujourd'hui, j'ai les dents un peu avancées, je n'ai pas voulu continuer mes soins.

 

 

 


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N
Je m'attendais à une suite du texte précédent, encore sur la maison familiale, mais non !<br /> Tous ces souvenirs, tu as la tête remplie de choses, bonnes ou mauvaises... C'est plus dur que le premier texte, j'ai moins l'impression de bonheur ici. Mais c'est normal je suppose
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M
<br /> <br /> Disons que la maison familiale a été connue jusqu'à une certaine époque puis petit à petit, c'est faite oubliée ... Oui, dans une vie, si tu ne connais que le bonheur, alors c'est que tu n'as pas<br /> du tout vivre ... c'est une époque de ma vie que je me devais de raconter. Même si j'ai eu beaucoup de mal à l'écrire.<br /> <br /> <br /> <br />
T
Tu as quand même plein de souvenirs d'école, si je pouvais en dire de même...
Répondre
M
<br /> <br /> Oui c'est vrai, sans doute parce que toutes ces périodes ont été marquantes pour moi ...<br /> <br /> <br /> <br />