Les forêts médusées
Dans un rêve, il y avait des choses étranges qui passaient près de moi, des choses volantes. Il y eu des chuchotements puis plus rien. C'était comme si quelqu'un me chuchotait à l'oreille " Nage, nage …" mais il n'y avait personne dans la chambre, il n'y avait que le vent qui poussait les arbres en arrière.
C'est le vent qui réveille l'existence, c'est le vent qui fait tourbillonner les sens. Il n'y a plus de véritable sphère, plus de paroles oubliées, il n'y a plus que le reste. Ce que l'on doit entendre, ce que l'on veut bien écouter.
Je me réveille souvent à la même heure, je pense souvent à la même chose, je prends souvent le même petit déjeuner, je regarde souvent les mêmes choses … Souvent, tout cela change. La mémoire n'est pas fixe, où bien c'est ce qu'elle veut nous faire comprendre. Mais la mienne reste comme figée. Elle s'est arrêté sans doute quelque part sur le quai d'une gare, dans les nuages, à contempler un paysage, les choses qui volent …
Ce matin, je repensais à la maison de mon village. Un jour, elle ne sera plus ma maison. Et cela m'effraie.
Je revois des oiseaux passer au dessus de mon velux.
Hier soir, avec Aurélien, nous regardions un épisode spécial de Doctor Who. Il y a avait des poissons qui volaient dans le brouillard. J'avais l'impression d'avoir déjà vu çà ailleurs … le brouillard et quelques êtres qui arrivent à s'échapper, à passer au-delà de toute barrière, du tourbillon de la vie.
Il faudra sans doute que je fasse comme eux. Il faudra passer au-delà du brouillard.
S'enfuir et glisser autrement. Comme des vers dans un trou, au fond de la terre. Ils veulent creuser leur trou, ils veulent fuir avant la fin d'un tout, mais la fin pour quoi ? Autour d'une table, on ne parle que de çà. Ils veulent aller voir ailleurs. Ils n'ont qu'à nager avec les poissons.
Chacun pense la même chose, que tout est débile, mais çà ne les empêche pas d'en parler jour après jour et encore et encore … Moi, je ne pense à rien. Je me dis qu'il fait beau. ll y a des oiseaux aux reflets rougeoyants mais pas de poissons.
Pour le moment, je pense à mon anglais. Je suis pitoyable. Je me souviens de l'époque des voyages scolaires et du : « Canaï hav a sponge pleaze for gratter the baignoire ? » et le sourire improbable de l'anglaise en face de moi. Rien à changé. J'aurais du regarder Arizona Dream en anglais, chanter In the death car plus souvent et éviter les éponges.
Ce qui m'a réveillé ce matin, c'est sans doute un de ces monstres sous mon lit. D'habitude, il dort jusqu'à tard dans la matinée, il ne dit jamais rien. Il voulait sans doute que je me mette à écrire, que j'écoute Bechet et ses oignons, que je pense aux flocons de neige qui ne tombent pas encore sur les arbres dénudés.
Oh Doudou Doudou ...!