Photo by Charlotte Zoller
Certains moments sont uniques, il convient donc de prendre le temps de les savourer. Un artiste pourrait sans doute nous décrire davantage cette énigme complexe à multiples inconnues, l'écriture, la peinture, la musique. En fait, tout cela est une entité de choses qui ne sont pas encore créées et qui ne peuvent devenir palpables même à celui qui pense en avoir compris le sens. En d'autres termes, une œuvre est inspirée mais n'a pas d'ambition outre le fait d'être désirable. Et sans doute aussi de faire plaisir. Voilà donc où je veux en venir : le nouvel album d'Interpol s'est fait attendre et donc, il est devenu désirable.
Nîmes le 08 juillet 2014
Lever le voile sur une œuvre ne doit pas être chose aisée, surtout quand on a mis du temps à la créer. Il faut d'abord en faire une esquisse, la brouillonner un peu, la détruire parfois pour en retirer juste ce qu'il faut, cette petite note abstraite qui ne se dissoudra pas dans l'air au clair de lune. Il faut savoir se chamailler, s'arrêter, se dissiper aussi et puis repartir pour créer cette chose qui sera mentionné sur les journaux comme fabuleux … peut être. Oui, sans contrefaçons, oui, assurément. Je n'arrive pas à hésiter, je n'ai pas vraiment de mots pour décrire les premières notes de All The Rage Back Home, l'avant-propos de l'album qui aspire à plus de liberté, au choix musical comme textuel. Une chanson de gestes peut-être bien, inspirée et aspirée par la voix de Paul Banks, un souffle, un murmure et puis … My Desire et Anywhere, deux chansons découvertes durant un concert au clair de lune. On a parfois l'impression d'un retour aux sources, comme d'un besoin de parfaire quelque chose qu'on a laissé là, dans un coin. Peut être bien que ces chansons, ces textes étaient là, planqués dans un recoin d'un vieux bureau poussiéreux depuis ce temps mémorable de Turn on The Bright Light.
Same Town, New Story complète mes propos et continue sur sa lancée de l'album parfait : il ne m'en faut pas plus pour déclarer cette chanson comme génialissime. Les effets sonores, les voix très présentes entourent cette chanson parfaitement mystique, onirique. Voilà c'est fait, le voile est levé. Les partitions en élaborations ne sont plus qu'un arrière goût de frénésie qui titille l'esprit, qui entourloupe l'auditeur. La frénésie encore et toujours autour de My Blue Supreme, à écouter dans le noir pour percevoir ce petit truc en plus, les sens en éveil. Un Everything is Wrong profond, envoûtant et sensé avec le sensiblement parfait Breaker 1, dans le noir et dans les entrailles d'Interpol tel Ancient Ways, ardemment provoquant. Avec Tidal Wave la fin est déjà proche, la rythmique est saccadée mais pourtant si esthétique. La lumière éphémère sur la scène, le noir sublime qui les habille, un peu de rouge passionnément et voilà déjà le final de cet opus incroyable, Twice as Hard, énigmatique.
El Pintor est un petit joyaux d'élégance, beaucoup plus structuré que les albums précédents, il est sublime et cache encore de jolies choses sur quelques B-Sides ou peut être bien dans le tiroir d'un bureau tout poussiéreux !