Les forêts médusées
La ville n'est pas toute proche, le chemin est long pour y aller. Il faut traverser un incessant tumulte de voitures, prendre de nombreuses routes ou autoroutes, passer les déviations ou bien encore se repérer. Luxembourg, quelque chose nous y pousse. La traversée des rues aux clubs très privés, le quartier de la gare et les magasins à trois étages. Je vois passer des silhouettes derrière les fenêtres. Tout cela est nouveau pour moi, tout me paraît grand. Grand, immense comme le Pont Adolphe suspendu au dessus du parc de la Pétrusse. Des avions passent, je me sens imperceptible. Des bâtiments modernes s'éparpillent et quelques monuments anciens se dressent devant nous, fiers, royaux. La cathédrale Notre Dame, puis plus loin, la place d'Armes, un bouillon de cultures. Tout cela donne le tournis et faire un tour autour des Casemates ressemble à un parcours sportif. Une air de détente, de l'air, si précieuse.
En se promenant, on se perd mais on se retrouve souvent devant une échoppe qui nous plaît, une halte gourmande dans un palais de la gourmandise. Mon palais en prend pleins les papilles ne serait-ce que pour une tasse de thé. La pluie s'abat sur les pavés de la ville. La danse des parapluies frétille au cœur de la ville.
Le parc de la Pétrusse, immense vallée où passent les coureurs de midi pile. Le vent flirte avec les tulipiers de Virginie, majestueux après la pluie. Se perdre dans les rues piétonnes, rencontrer des statues aux traverses, l'émotion des pierres aux intellectuels, ce qui s'y passent, ce qui s'y perd mais que l'on veut garder. Une bouchée à la fraise, une douceur qui nous attise, nous émeut.
Le regard perdu au lointain, je voudrais m'attarder dans ce lieu unique, là sur un banc public, une tasse de thé bouillante à la main. M'entretenir avec les arbres, les oiseaux, le créateur de cette tartelette aux fraises. Me cultiver, outrepasser le dérisoire, où juste regarder passer les gens, le temps dans cette cité qui n'a que du caractère, du modernisme à créer une ville où il fait bon vivre. Oublier le moment précis, quitter le monde, quitter tout le reste et embrasser tendrement Aurélien. Sans lui, je ne serais pas là.
La campagne. Cachée à des kilomètres de la grande ville. C'est le retour à la nature, aux grands espaces. C'est Vianden. La petite voiture rouge dévale la pente, tandis que sur une autre pente, un rocher, un immense château nous regarde de haut. Un édifice magnifique qui force l'imagination. Les princes, les princesses comme dans les rêves d'enfant.
De la vallée en contrebas se dessine un petit village, escarpé, douillé. Des pavés nous mènent à de vieilles bicoques, à l'Our sur lequel tanguent quelques canards. Ils dessinent des cercles, font fi de nous demander une chose à dévorer. Et si cette citée cachait quelques trésors ?
Au petit jour, une brume matinale enveloppe délicatement la rivière. La lumière s'étend alors, majestueuse, troublante. Comme quand on se retrouve au cœur du château, entre l'âme du roman et du gothique, l'âme romantique d'un certain Victor Hugo.
Se perdre autour de Vianden est une bonne idée. Des forêts s'étendent à perte de vue et ne pas avoir de carte routière sous les yeux en devient presque amusant. Au cœur de la vallée de la Blees, Brandenbourg nous apparaît. Village pittoresque où un drapeau américain flotte dans les airs. Un château culmine le petit bourg, niché en plein cœur de la forêt. Quelle merveille d'admirer une telle construction au beau milieu d'un rien ! Le tour de la forteresse, un cœur de lierre, quelques brisures de porcelaine et un père Noël. Des restes qui nous restent dans la poche, sur une photographie que l'on gardera à l'abri toute une vie. Quelques bribes éparses d'un voyage que j'aimerais éternel recommencement.